Chères toutes et tous,

Nous venons d'annoncer avec Julien Chiquet notre responsable de Cellule Publications la parution du dernier numéro du Journal de la Société Française de Statistique. Il s'agit du volume 162, c'est considérable et je me permets de rappeler aux plus jeunes que notre journal a pris la suite en 1998 du Journal de la Société Statistique de Paris dont le premier numéro date de 1860. Voici ce qu'a écrit dans son éditorial mon Maître et ami Henri Caussinus :

Avec les numéros 3 et 4 de 1998, le Journal de la Société de Statistique de Paris devient Journal de la Société Française de Statistique, changement de dénomination naturel dans le processus de fusion qui a vu la création de cette nouvelle Société. Cette fusion marque la volonté de créer une Société représentative de tous les statisticiens et de tous les aspects de la statistique.

La Société Statistique de Paris et son Journal ont joué un rôle essentiel dans le développement de notre discipline (tant au niveau national qu'international) et dans la mise en lumière de son importance cruciale dans la société.

Vous trouverez ci-dessous quelques extraits d'articles rédigés par des figures historiques de notre communauté qui illustrent parfaitement cela. Je vous rappelle que toutes les archives de notre Journal sont disponibles ici.

Augustin de Malarce Les origines de la société de statistique de Paris Journal de la société statistique de Paris, tome 35 (1894), p. 68-77

Un grand philosophe grec, Pythagore, avait érigé en dogme cet adage : Les nombres gouvernent le monde. C'était trop dire. Mais à cette fin du XIX ième siècle, nous pouvons penser que la statistique, la science des nombres sociaux, favorise les bonnes lois et les bons gouvernements.

Émile Borel La statistique et l’organisation de la présidence du conseil des ministres Journal de la société statistique de Paris, tome 61 (1920), p. 9-13

Mais ce n'est pas ici qu'il est nécessaire d'insister sur le fait que la statistique est un auxiliaire indispensable pour ceux qui assument la lourde tâche de gouverner un pays. Si cependant nous sommes tous d'accord sur le principe, il peut y avoir sur les modes d'exécution les plus favorables, des divergences d'appréciation qui pourraient conduire à une discussion très profitable. Le moment me paraît particulièrement bien choisi pour cette discussion car c'est dans quelques semaines que la France va, après les Gouvernements qui ont gagné la guerre, connaître les Gouvernements qui organiseront la paix. Nous n'avons pas à intervenir ici dans les questions politiques, mais nous pouvons affirmer que, quels que soient ces Gouvernements, l'emploi judicieux des statistiques leur sera nécessaire.

Georges Darmois Sur le rendement des observations statistiques Journal de la société statistique de Paris, tome 78 (1937), p. 310-319

Comme il ne semble guère douteux que nous entrerons dans la voie d'expériences assez vastes, pour tout ce qui regarde ces problèmes de la connaissance acquise par l'observation statistique, il y a une question d'emploi des ressources de toute nature qu'il faut se poser au début. Il est évidemment désirable qu'on écarte les méthodes qui ne donneraient qu'une information trop petite, et qu'on tende à employer les méthodes, s'il en existe, qui donnent le maximum d'information.

Maurice Fréchet Sur une limitation très générale de la dispersion de la médiane Journal de la société statistique de Paris, tome 81 (1940), p. 67-78

M. Fréchet répond, au sujet des premières observations de M. Roy, concernant le choix entre la médiane et la moyenne (...). Cependant, il lui paraît plus important encore, pour se guider dans ce choix, de se référer à la signification concrète de la grandeur à étudier. Si, par exemple, on veut avoir une idée de l'aisance générale qui règne dans un pays, il vaudra mieux la représenter par le revenu médiane que par le revenu moyen. Car l'idée intuitive qu'il s'agit de chiffrer ne devrait pas être affectée si on réduit beaucoup les plus petits revenus, ou si l'on augmente beaucoup les revenus les plus gros.

Edmond Malinvaud Les élasticités par rapport aux prix dans les échanges internationaux Journal de la société statistique de Paris, tome 91 (1950), p. 177-188

Il n'en reste pas moins que les études économétriques examinées ici sont du plus haut intérêt à divers points de vue, notamment elles ont permis de bien saisir les aspects divers de l'effet-revenu sur le volume des échanges, elles ont par ailleurs dégagé une méthode pour l'étude des séries statistiques du commerce international, enfin en schématisant l'évolution durant la période d'entre-deux guerres, elles constituent un apport essentiel à l'histoire de l'évolution économique. En un mot elles permettent d'asseoir de plus en plus la théorie économique sur une base expérimentale solide et l'on sait à quel point les sciences sociales ont besoin de ces apports empiriques. Il serait néanmoins dangereux d'accepter aveuglément leurs résultats pour en tirer des conclusions qu'elles ne permettent pas.

Il est important de rappeler également que le Journal de la SFdS a fusionné à partir de 2007 avec la Revue de Statistique Appliquée. Henri Caussinus et Pierre Cazes, un autre ami, rappelaient dans leur éditorial commun en 2007, les propos de Christiane Guinot qui présidait alors, avec beaucoup de clairvoyance, aux destinées de notre société
qu'un objectif majeur de la Société était de rassembler l'ensemble des acteurs de la statistique et de favoriser la communication entre ceux qui enseignent et ceux qui pratiquent, ceux dont les préoccupations sont plus théoriques et ceux dont les objectifs sont plus pragmatiques.

Concernant la Revue de Statistique Appliquée, dont les archives se trouvent ici, vous trouverez ci-dessous l'extrait d'un article saillant.

William Cochran Analyse des classifications d’ordre Revue de statistique appliquée, tome 14, no 2 (1966), p. 5-17

(...) l'attention accordée aux indices de similarité par les taxinomistes, il n’est que normal que les méthodes de R.N. Shepard y doivent trouver bientôt leur application ; mais à notre connaissance aucun travail n’a encore été publié qui trace ainsi la carte des espèces.

Avec Computo, Julien Chiquet et son équipe vous propose un mode de publication extrêmement novateur mettant en avant la reproductibilité des résultats numériques. Il ne fait pour moi aucun doute que ce nouveau journal saura se montrer digne de ses prédécesseurs.

Ceci est ma dernière Newsletter dédiée (comme nous avons l'habitude de les dénommer avec Servane). Je vais quitter dans quelques jours la Présidence de la SFdS, ce fût un honneur que d'être votre porte-voix, j'écris ces mots avec une certaine émotion.

Longue vie à la SFdS,
Très amicalement,

Jean-Michel Marin
Président de la SFdS