La statistique dans la cité n° 39 - avril 2024
Sommaire du n° 39

Éditorial

Méthodes :
                                     - Comment mesurer les salaires en temps réel ?
                                     - Les délais de publication des statistiques sur les salaires sont-ils
                                      un frein à l’efficacité de la politique monétaire ?
                                     - Mesurer les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux
                                     - Comment les nouvelles techniques de la data science permettent
                                      d’améliorer le suivi de la conjoncture ?
                                     - Le Rapport mondial sur le bonheur 2024
                                     - Peut-on mesurer la cote de popularité de Xi Jinping ?

Anniversaires :
                                     - 21 mars 1974 : Safari ou la chasse aux Français
                                     - 14 avril 1994 : adoption des principes fondamentaux de la
                                      statistique officielle

Lu pour vous

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Vie du groupe


Tous les numéros précédents de l'infolettre sont téléchargeables sur le site du groupe SEP


Editorial

Depuis la parution de la précédente édition de La statistique dans la cité, il y a deux mois, ont été célébrés deux anniversaires commémorant deux évènements qui ont entraîné de profonds changements dans la production de la statistique publique. Le chapitre Anniversaires de cette édition relate ces deux évènements : le premier a été la publication le 21 mars 1974 dans le journal Le Monde de l’article devenue célèbre intitulé Safari ou la chasse aux français qui a été à l’origine de la création de la Cnil et même, à plus longue échéance, de l’adoption par le Parlement et le Conseil européens du Règlement général sur la protection des données (RGPD) ; le second a été l’adoption par la Commission de statistique des Nations Unies le 14 avril 1994 des principes fondamentaux de la statistique officielle qui ont joué un rôle déterminant dans l'élaboration des systèmes statistiques nationaux et l'établissement de l'intégrité des données et de la confiance du public dans productions statistiques.

Plusieurs articles de ce numéro présentent des méthodes innovantes dont certaines ont pu être le thème de récents Cafés de la statistique. On y trouvera aussi les rubriques habituelles consacrées aux notes de lecture ou à la vie de notre groupe. Nous rappelons que la totalité des numéros passés de La statistique dans la cité sont accessibles dans les pages de notre groupe sur le site de la SFdS.

La prochaine saison des Cafés de la statistique sera la vingtième. Nous souhaitons que les thèmes retenus correspondent aux souhaits des nombreux participants à ces Cafés et nous vous invitons donc à émettre des propositions de thèmes que nous pourrions retenir au cours de nos prochaines saisons en nous écrivant à l’adresse sep@sfds.asso.fr.

Et comme d’habitude, nous souhaitons vivement que vous nous fassiez part de vos réactions et de vos commentaires sur nos activités et en particulier sur cette édition de l’infolettre.


Méthodes

Les données sur les revenus en temps réel ?

Le dispositif de la Déclaration sociale nominative (DSN) bien décrit sur le site net-entreprises.fr du Groupement d’intérêt public Modernisation des déclarations sociales, créé en 2000, est mal connu du public bien qu’il soit à la fois :

- une simplification radicale et réussie
  • pour les bénéficiaires de revenus d’activité et de revenus sociaux, qui doivent fournir aux administrations une foule d’informations sur leurs revenus…
  • et pour les entreprises et les organismes sociaux qui versent ces revenus, lesquels doivent eux aussi être déclarés auprès d’un grand nombre d’administrations (y compris l’Insee) …
- un système d’information complexe, résultant d’un projet conduit avec persévérance par l’État et la multitude d’acteurs, entreprises et organismes qui ont conçu et mis en œuvre ce monument, dont le fonctionnement, une fois en place (nous y sommes !), est devenu largement automatique ou très simple.

L’idée initiale est que toutes les déclarations (aux administrations) relatives aux salaires puissent être réalisées en une fois chaque mois, en ligne (via un unique formulaire électronique) ou en sous-produit dématérialisé du logiciel de paye de chaque employeur.

La DSN au sens strict mentionne l’employeur, l’identité du salarié et les composantes de son salaire. Sa transmission mensuelle à chacune des administrations concernées se réalise en une seule opération pour l’employeur. S’il y a lieu, le dispositif DSN permet aussi à l’employeur de signaler des « événements » relatifs au salarié (embauche, fin de contrat ou licenciement, arrêt de travail pour maladie, etc.).

En retour, les déclarants reçoivent des accusés de réception, des signalements d’anomalies le cas échéant, les montants mensuels de l’impôt à la source pour chaque salarié, à quoi s’ajoute l’indication du montant global des impôts qui seront prélevés à la source ce mois sur le compte bancaire de l’employeur.

La DSN est complétée par un dispositif appelé Pasrau (Passage des revenus autres) comprenant :

- à titre transitoire, les déclarations de salaires des employeurs qui ne sont pas encore passés à la DSN (une partie de la fonction publique, les particuliers employeurs, etc.)

- et de manière pérenne, les déclarations relatives aux revenus sociaux :
  • les revenus de remplacement (allocations chômage, pensions de retraite, indemnités journalières et allocations diverses) qui sont versés et déclarés par les régimes de retraite, les caisses d’allocations familiales et les autres organismes sociaux ;
  • les versements des employeurs (autres que les salaires) à leurs salariés ainsi que leurs versements de cotisations à l’URSSAF.
Ainsi, le système d’information en temps réel sur les salaires mensuels a déjà rendu possible le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu (pour ce qui concerne les salariés). Complété par la connaissance des revenus sociaux en temps réel, ce système d’information va rendre possible l’identification des personnes éligibles à tel ou tel revenu de remplacement sous condition de ressources et réduire ainsi le non-recours au RSA ou à l’aide au logement notamment, non-recours massif surtout dû à un défaut d’information des personnes éligibles et qui contribue à accroître leur précarité.

Faut-il ajouter que la connaissance fine et en temps réel de l’ensemble des salaires et des revenus sociaux, ajoutée à la qualité remarquable des données ainsi collectées, permettrait une analyse statistique des tendances récentes de l’évolution des revenus d’activité et de remplacement avec une précision sans égale et sans doute sans équivalent dans les autres grandes économies ? La réactivité en la matière est un enjeu considérable pour la politique économique et monétaire.


Les délais de publication des statistiques sur les salaires sont-ils un frein à l’efficacité de la politique monétaire ?

Dans son édition du 12 décembre 2023, The Economist argumente que la Banque centrale européenne (BCE) court le risque de baisser les taux trop tardivement, au prix d’un ralentissement de la croissance plus important que nécessaire. Cette prudence de la BCE viendrait de sa crainte que les hausses de salaires persistent et viennent ainsi renforcer les pressions inflationnistes. Les baisses de taux ne seraient ainsi susceptibles d’intervenir qu’après la publication des statistiques sur les salaires et probablement trop tard dans le cycle conjoncturel.

The Economist fait état de données en temps réel sur les salaires, provenant du site de recrutement Indeed, qui indiqueraient une baisse du niveau des augmentations de salaires au début de l’année 2024. Ces données seraient, dans le passé, plutôt bien corrélées avec les statistiques officielles, et l’hebdomadaire regrette qu’elles ne soient pas plus utilisées dans la définition de la politique monétaire.

Le Café de la statistique du 19 mars sur l’amélioration du suivi de la conjoncture à l’aide de données nouvelles, introduit par Olivier Garnier et Jean-Charles Bricongne, de la Banque de France, a montré tout l’intérêt de d’exploitation de telles données. Mais, comme le souligne l’article précédent, il n’est pas besoin d’aller chercher en-dehors du système statistique public, en France du moins, pour collecter des données réactives sur les évolutions salariales. L’Insee a publié le 14 mars les données sur le deuxième semestre 2023. Quelle serait la corrélation avec les données en temps réel d’un site de recrutement comme Indeed ou avec les données que l’on pourrait trouver sur le site net.entreprises.fr décrit dans l’article précédent ? Serait-il possible d’aller plus vite dans la publication de ces données ? L’intérêt de l’article de The Economist est de montrer l’importance de ce débat dans la définition de politiques ayant un impact sur la vie de tous.


Mesurer les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux

Notre invitée au Café de la statistique du mardi 13 février 2024, Christine Gonzalez-Demichel, cheffe du SSMSI (service statistique ministériel de la Sécurité intérieure), a présenté les améliorations apportées depuis dix ans pour moderniser le dispositif statistique sur le suivi de la délinquance.

Parmi ces améliorations figure le bilan statistique sur les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux. Le dernier bilan établi en 2023, a permis de rapprocher les infractions issues des procédures enregistrées par les services de police et de gendarmerie des données issues des enquêtes de victimation ; il est détaillé dans la lettre Info-Rapide n°34 du SSMSI dont le quotidien Le Monde a présenté les principaux résultats dans son édition datée du 20 mars.

Les crimes ou délits commis « en raison de l’ethnie, la nation, d’une prétendue race ou de la religion » en France ont augmenté de 32 % en 2023 par rapport à 2022. La police et la gendarmerie ont enregistré près de 15 000 infractions racistes, xénophobes ou antireligieuses en 2023, dont 8 500 crimes ou délits, avec une nette accélération en fin d’année en lien avec les événements du 7 octobre 2023 au Proche-Orient à la suite des attaques du Hamas contre Israël, le 7 octobre.

Les hommes, les personnes âgées de 25 à 54 ans et les étrangers ressortissants d’un pays d’Afrique sont surreprésentés parmi les victimes. Seules 4 % d’entre elles portent plainte. Or, selon l’enquête statistique (1) Vécu et ressenti en matière de sécurité, près de 800 000 personnes de 18 ans et plus vivant en France métropolitaine déclarent avoir été victimes d’une atteinte « à caractère raciste » en 2022, soit 1,6 % de la population majeure.

((1) Cette enquête effectuée pour la première fois en 2022 a été reconduite pour la troisième fois à partir du 14 février 2024


Comment les nouvelles techniques de la data science permettent d’améliorer le suivi de la conjoncture ?

Le Café de la statistique tenu le 19 mars dernier a été l’occasion pour deux experts de la Banque de France, Olivier Garnier, Directeur général des statistiques, des études et de l’international, et Jean-Charles Bricongne, direction des enquêtes de conjoncture et des études macroéconomiques et structurelles, de présenter comment les nouvelles techniques de la data science permettent d’améliorer le suivi de la conjoncture.

Ils ont notamment montré comment la téléphonie mobile peut améliorer les statistiques traditionnelles de la balance des paiements pour ce qui concerne la ligne voyages de cette statistique. Ils ont aussi présenté plusieurs exemples d’utilisation des méthodes d’analyse textuelle appliquées aux media et aux réseaux sociaux permettant d’identifier les périodes d’incertitude de la conjoncture ou encore de prédire l’évolution de l’inflation. Ils ont enfin montré comment des données recueillies peuvent améliorer le suivi de la production de ciment et anticiper ainsi les statistiques du BTP.

Rappelons que les exposés introductifs des Cafés de la statistique sont disponibles dans les pages du Groupe du site de la SFdS.


Le Rapport mondial sur le bonheur 2024

Les Nations Unies célèbrent chaque année depuis 2012 la Journée internationale du bonheur et éditent à cette occasion un rapport mondial. Le rapport mondial sur le bonheur 2024 a été publié le 20 mars 2024 par le Réseau des solutions pour un développement durable des Nations Unies (2) avec le concours du Centre de recherche sur le bien-être (Wellbeing Research Center) de l’Université d’Oxford et de Gallup.

Un Score de bonheur est calculé pour chacun des pays membres de l’Onu ; il s’agit, comme pour l’Indice du développement humain, d’un indice synthétique calculé à partir de six autres indicateurs : le PIB par habitant, le soutien social (3), l’espérance de vie en bonne santé, la liberté dans les choix de vie de l'individu, la générosité perçue et le niveau de corruption perçu. Parmi les dix pays ayant le meilleur score, on trouve les cinq pays nordiques, la Finlande étant en tête du classement suivie de peu par la Norvège. Par rapport aux années précédentes, le rang de la France semble en net recul, passant de la 21e place à la 27e.

La résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies proclamant en 2012 la Journée internationale du bonheur, avait été proposée par le Bhoutan, dont le roi Jigme Singye Wangchuk avait décidé en 1972 d’utiliser un indice de Bonheur National Brut (BNB) de préférence au PNB pour guider l'établissement de plans de développement du pays tout en respectant les valeurs spirituelles bouddhistes. Le jeune roi, il avait alors 16 ans, considérait que les indicateurs économiques traditionnels ne tenaient pas suffisamment compte du bonheur des individus et favorisaient la croissance sans limites dénoncée à l’époque par le Club de Rome (rapport Meadows). En 2008, le BNB a été intégré à la nouvelle Constitution du pays. À ses débuts, cet indicateur n'a pas du tout été pris au sérieux par la communauté internationale, mais aujourd'hui il est cité en exemple. Le Bhoutan présente un bilan carbone négatif grâce à ses forêts qui couvrent 70 % du territoire ; la constitution interdit que ce chiffre ne descende en-dessous de 60 %. En 2024, il va quitter le groupe des pays les moins avancés (PMA) pour devenir pays à revenu intermédiaire.

(2) Le Réseau des solutions pour un développement durable a été créé en 2012 par le Secrétaire général des Nations Unies dans le but de mobiliser à l’échelle planétaire l’expertise scientifique et technique à l’appui de solutions pratiques en matière de développement durable et de suivi des ODD (Objectifs de développement durable). Il collabore étroitement avec les unités du Secrétariat général des Nations Unies (dont la division de statistique), les agences des Nations Unies, les institutions de Bretton-Woods, le secteur privé et la société civile. Il est actuellement présidé par Jeffrey Sachs.
(3) En psychologie, le soutien social utilisé est un concept dans lequel un individu reçoit de son environnement social l’information qu’il est aimé, estimé, valorisé et qu’il appartient à un réseau de communication au sein duquel les individus sont soumis à des obligations mutuelles.


Peut-on mesurer la cote de popularité de Xi Jinping ?

Le parti communiste chinois (PCC) aime à prétendre qu’il est légitime à gouverner, car la population le soutient. L’université d’Harvard, en collaboration avec des instituts de sondage chinois, a mené des enquêtes d’opinion en Chine entre 2003 et 2016. La dernière indiquait que 90 % des interviewés étaient satisfaits de la gestion du PCC. Dans une enquête de novembre 2023, menée par un cabinet de consultant américain, 85 % de la population exprimait sa confiance dans le gouvernement.

Peut-on accorder le moindre crédit à des enquêtes menées dans une autocratie où la surveillance des individus est généralisée ? The Economist, dans son édition du 16 janvier, relate une expérimentation astucieuse menée par une université de Californie. L’échantillon de l’enquête, menée sur internet, a été partagé en deux. Au premier groupe ont été proposées trois affirmations anodines (« je suis un fan de sport », …). Le deuxième groupe s’est vu proposer les mêmes trois affirmations, auxquelles on a ajouté un item plus sensible : « Je soutiens le leadership du camarade Xi Jinping » ou « Le système de gouvernement chinois est le meilleur que je connaisse ». Crucialement, les interviewés devaient simplement indiquer le nombre d’items avec lesquels ils étaient en accord, et non à indiquer leur accord pour chaque item séparément. En comparant le nombre moyen d’items entre les deux groupes, il est possible d’estimer combien de répondants sont d’accord avec les items plus controversés.

Selon cette méthode, environ 50 % des Chinois ne considèrent pas que leur système de gouvernement est le meilleur. Le soutien au PCC et à son dirigeant Xi serait tout de même de 65 % à 70 %, ce qui peut faire pâlir d’envie bien des dirigeants occidentaux.


Anniversaires

21 mars 1974 : Safari ou la chasse aux Français

Il y a cinquante ans, dans son numéro daté du 21 mars 1974, Le Monde publiait un article de Philippe Boucher intitulé « Safari, ou la chasse aux Français ». Cet article, dont l’existence est probablement connue d’un grand nombre des lecteurs de La statistique dans la cité, décrit un projet du ministère de l’intérieur visant « à informatiser et à uniformiser 100 millions de fiches réparties dans 400 fichiers au sein des différents services de police » à partir du NIR dont l’Insee préparait l’informatisation dans son projet Safari lancé en 1970. À l’occasion de cet anniversaire, le Centre d’études et de recherches administratives, politiques et sociale (Ceraps) de l’Université de Lille a organisé une table ronde à l’EHESS le 21 mars dernier, le jour même de l’anniversaire de l’article de Philippe Boucher.

Cet article se focalisait sur le projet du ministère de l’intérieur et ne faisait aucune allusion au projet lancé au sein de l’Insee quatre ans auparavant visant à automatiser le répertoire des numéros d’identité à 13 chiffres des personnes physiques (plus connu alors sous le nom de numéro de sécurité sociale) ; ce répertoire était tenu à l’époque à la main. Dans un article publié en mars 1970 dans le numéro 10 de la revue Économie et statistique, Jacques Desabie décrit ce projet, sans évoquer le nom de Safari que lui avaient donné les informaticiens de l’Insee, mais il indique néanmoins que le répertoire ainsi informatisé pourrait constituer un « précieux outil de gestion administrative » et il évoque aussi les possibilités d’appariements de fichiers à des fins statistiques. Toutefois, pendant quatre ans, ce projet reste interne à l’Insee et ne donne pas lieu à polémique jusqu’à l’information donnée par le journal Le Monde sur le projet d’utilisation de ce numéro d’identité pour l’appariement des fichiers du ministère de l’intérieur. Suite à l’émotion soulevée par l’article de Philippe Boucher, le gouvernement de Pierre Messmer décide d’abandonner le projet du ministère de l’intérieur comme celui de l’Insee et met en place une commission appelée Informatique et libertés dont les travaux mèneront, quatre ans plus tard, à la promulgation de la loi Informatique et Libertés (LIL) du 6 janvier 1978, et à la création de la Cnil. Cette loi a connu depuis de multiples évolutions, notamment pour encadrer la possibilité pour les chercheurs d’accéder à l’immense capital de données aujourd’hui disponible, y compris les données de santé, tout en garantissant la protection des droits des personnes. Et bien sûr, il est inutile de rappeler, au niveau européen, le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) adopté trente-huit années plus tard par le Parlement et le Conseil européens.

Quel que soit le jugement que l’on peut porter sur l’article de Philippe Boucher, il est indéniable qu’il a constitué une étape fondamentale dans la production statistique publique, non seulement en France mais dans de nombreux autres pays.

Pour en savoir plus, on peut se référer à l’article publié par Claude Poulain en 2022 dans le numéro 134-135 de la revue électronique Terminal ainsi qu’à l’article de Jacques Desabie cité plus haut et se reporter à l’article Le Nir et les bases de données paru dans le numéro 36 de La statistique dans la cité ; cet article évoquait les problèmes qu’a pu poser au fil du temps l’application de la LIL et les multiples évolutions qu’a connues cette loi.


14 avril 1994 : adoption des principes fondamentaux de la statistique officielle

Il y a trente ans, le 14 avril 1994, la Commission (4) de statistique des Nations-Unies adoptait les Principes fondamentaux de la statistique officielle (FPOS). Ces principes avaient été préparés en 1990 et 1991 par la Conférence (5) des Statisticiens Européens à la demande des pays d’Europe Centrale et Orientale qui venaient de débuter leur transition vers un système démocratique et une économie de marché et approuvés à un niveau politique le 15 avril 1992 par la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies comme en avait fait part La statistique dans la cité dans son numéro 29 paru en avril 2022. Dans son édition du 29 mars 2024, Variances publie un article sur cet anniversaire.

À cette occasion, la division de Statistique des Nations Unies a organisé le 26 février 2024 un Forum de Haut Niveau à la veille de l’ouverture de la 55e session de la Commission de statistique. Ce Forum était aussi l’occasion de célébrer le 10e anniversaire du vote le 29 janvier 2014 de la résolution 68/261 de l’Assemblée Générale des Nations Unies approuvant ces principes et leur donnant ainsi un poids politique. Il est possible de visionner ce Forum en podcast sur la chaîne WebTV des Nations Unies.

Cet événement a permis de retracer la genèse des FPOS et de souligner comment ils ont joué au fil des années un rôle déterminant dans l'élaboration des systèmes statistiques nationaux et l'établissement de l'intégrité des données et de la confiance du public dans les productions statistiques. Il a aussi examiné comment ils peuvent permettre aux statisticiens de relever les défis dans un écosystème de données en évolution rapide.

(4) La Commission de statistique, basée à New York, est un organisme subsidiaire du Conseil économique et social des Nations Unies.
(5) La Conférence des statisticiens européens, basée à Genève, est un organisme subsidiaire à la fois de la Commission de statistique des Nations Unies et de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies.


Lu pour vous

L’Autorité de la statistique publique (ASP) a publié son rapport annuel 2023

Le rapport annuel 2023 de l’ASP rappelle qu’au cours de l’année, le service statistique public (SSP) a continué à s’adapter au contexte conjoncturel mouvant, toujours marqué par des tensions inflationnistes et des incertitudes au niveau international, afin de répondre aux besoins d’éclairage des acteurs et des usagers en matière d’informations statistiques et d’analyses. Ses apports ont par exemple été notables sur le tournant intervenu en matière de natalité et de fécondité, la situation des immigrés et des enfants d’immigrés, l’approche élargie de la redistribution à partir des « comptes nationaux distribués ». Outre les éclairages nouveaux apportés en matière économique, sur la crise sanitaire et en matière d’évolutions démographiques et sociales, le service statistique public a poursuivi ses investissements visant à enrichir des dispositifs statistiques essentiels ou à élaborer des outils partagés. Les efforts entrepris depuis plusieurs années pour mettre à disposition les travaux du SSP de manière transparente, claire et accessible, dans le respect du Code de bonnes pratiques de la statistique européenne, ont aussi connu de nouveaux développements en 2023.

Les lecteurs de La statistique dans la cité sont invités à consulter ce rapport très riche et qui permet, comme nous le souhaitons, d’enrichir le débat public en montrant comment la statistique peut éclairer les problèmes de société.


L’indice de liberté académique

Cet indice a été présenté dans le supplément Sciences et Médecine du quotidien Le Monde daté du mercredi 3 avril 2024, dans un dossier intitulé « La liberté académique régresse dans le monde ». L’indice de liberté académique est un indice synthétique, bâti sur le modèle de l’IDH (indice du développement humain) … ou du score de bonheur présenté un peu plus haut dans une autre note de lecture. Comme ces autres indices, il va de 0 à 1 et est bâti à partir de cinq critères évalués annuellement dans 179 pays par 2 300 experts : la liberté de recherche et d’enseignement, la liberté d’échange et de diffusion universitaires, la liberté d’expression académique et culturelle, l’autonomie institutionnelle des universités et l’intégrité des campus. Les pays de l’espace économique européen (à l’exception de la Hongrie), le Canada, l’Australie, la Nouvelle Zélande, mais aussi l’Afrique du Sud, le Kenya et le Nigéria obtiennent un indice jugé élevé (supérieur à 0,8) ; on peut s’étonner de constater que les États-Unis n’obtiennent qu’un score de 0,69. Mais doit-on s’étonner qu’on trouve parmi les pays ayant un indice jugé faible (inférieur à 0,2) l’Iran, la Russie, la Turquie, mais aussi la Chine, malgré le nombre impressionnant de publications scientifiques éditées dans ce pays, nombre supérieur à celui des États-Unis. Une constatation inquiétante est que, en 2023, 34 % des pays analysés disposaient d’un indice élevé alors qu’il y en avait 42 % en 2006.


Annonce

Le STATEC (Institut national de la statistique et des études économiques du Grand-Duché de Luxembourg), l’Université du Luxembourg et la Société Luxembourgeoise du Luxembourg accueilleront du mercredi 6 au vendredi 8 novembre 2024, sur le Campus de l'Université du Luxembourg à Esch-Belval, le 13e Colloque international francophone sur les sondages. Cette rencontre scientifique internationale est organisée, tous les deux à trois ans depuis 1997, sous l’égide du groupe Enquêtes de la SFdS. Elle réunit des chercheurs et praticiens, issus des instituts publics ou du secteur privé, qui réalisent ou utilisent des enquêtes par sondage. L’objet du colloque de 2024 est de faire le point sur l’état des pratiques et de la recherche dans les divers domaines de la méthodologie des enquêtes et des sondages. Il s'agit aussi de mettre en rapport toutes les personnes travaillant dans le domaine des enquêtes, que ce soit des concepteurs d'études, des gestionnaires de collecte ou des utilisateurs de données. L'appel à communications est ouvert. La date limite pour les soumissions est fixée au 30 avril 2024. Pour toute question ou information, contactez le Comité d’organisation à l'adresse sondages2024@sciencesconf.org.


Vie du groupe

Depuis la parution du précédent numéro de La statistique dans la cité, deux Cafés de la statistique ont été organisés :
• le mardi 19 mars avec deux experts de la Banque de France, Olivier Garnier et Jean-Charles Bricongne qui ont traité de l’utilisation de méthodes innovantes pour le suivi de la conjoncture en complément des enquêtes quantitatives habituelles (voir plus haut une brève dans le chapitre Méthodes consacrée à ce Café) ;
• le mardi 9 avril avec Pierre-Michel Menger et Colombe Saillard, du Collège de France sur les multiples raisons de se préoccuper des mathématiques.

Les prochains Cafés auront lieu au Café du Pont-Neuf le mardi 21 mai où Xavier Timbeau, directeur principal à l’OFCE et président de la commission Environnement et développement durable du Cnis, parlera de la transition énergétique, et le mardi 11 juin où Pascal Saint-Amans, ancien directeur du Centre de politique et d’administration fiscales à l’OCDE, traitera de la fraude fiscale ; il a notamment joué un rôle clé dans l'avancement de l'agenda de la transparence fiscale dans le cadre du G20 et dans l’adoption de l'impôt mondial sur les multinationales qui permet de taxer les bénéfices des entreprises à hauteur de 15 % minimum, quel que soit le lieu où elles déclarent leurs profits.
Rappelons qu’un Café sera organisé à Bordeaux le mardi 28 mai pendant les 55e Journées de Statistique de la SFdS sur le thème des sondages électoraux avec Bruno Jeanbart, vice-président d’Opinion Way, douze jours avant les élections européennes.

Les lecteurs de La statistique dans la cité sont invités à proposer des thèmes de Café en écrivant à l’adresse du Groupe sep@sfds.asso.fr


Responsable de l’infolettre : Antoine Moreau, président du groupe SEP
Rédacteur en chef : Jean-Louis Bodin
Secrétaire de rédaction : Jean-Pierre Le Gléau
Webmestre : Érik Zolotoukhine

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